Aujourd’hui nous vous proposons de découvrir un grand classique : Le vieil homme et la mer. Ernest Hemingway nous emmène dans un voyage sur les mers qui a de quoi faire réfléchir.
Combien de fois n’avons-nous pas entendu “lis ce livre c’est un classique !” ? Et combien de fois avons-nous refusé de l’ouvrir par esprit de contradiction ?
J’ai eu le même esprit de contradiction quant au court roman d' Hemingway Le vieil homme et la mer (ou The old man and the Sea si vous préférez son titre anglais). Publié en 1953, honoré d’un prix Nobel en 1954, cet ouvrage a beaucoup fait parler de lui mais l’on peut se demander pourquoi. Comment un si court roman d’à peine 100 pages a pu autant captiver ?
Ce roman raconte l’anecdote d’un vieux pêcheur cubain malchanceux qui n’arrive pas à attraper de poisson. Elle a souvent été interprétée comme une image de la sagesse et de l’humilité humaines. Ce récit peut ainsi être lu comme une allégorie dans laquelle chaque personnage a un rôle symbolique. Les personnages principaux sont dépouillés de leurs attributs traditionnels (portrait physique, récit de leur passé, consistance psychologique etc) et sont réduits à l’essentiel. Ils deviennent ainsi des des types et renvoient à des valeurs spécifiques qui parlent à tout lecteur. Le vieil homme incarne ainsi la sagesse et l’humilité et le jeune garçon à ses côtés la curiosité et la fougue de la jeunesse.
Ces personnages sont les héros d’un récit à l’issue tragique : celui de la pêche décevante du vieil homme. Cependant, ce n’est pas l’histoire en tant que telle qui intéresse le lecteur mais plutôt la mosaïque de thèmes qui y sont abordés tels que la place de l’homme dans la nature, le rapport de l’homme à l’animal, l’hubris humaine ou encore l’importance de la volonté dans les batailles de l’existence, l’absurdité de la vie.
Cette quasi épopée incite ainsi le lecteur à une introspection et à poser de temps à autre l’ouvrage pour réfléchir à ce qui lui est dit. Hemingway invite à voir le poisson et l’Homme comme des égaux : “Tu vas me tuer poisson, pensa le vieil homme. Mais c’est ton droit. Je n’ai jamais rien vu de plus grand, de plus beau, de plus calme et de plus noble que toi, mon frère. Approche donc et tue moi. Peu m’importe qui tue qui.” L’auteur invite également le lecteur à une grande humilité et à lutter contre l’hubris qui condamne l’Homme à toujours dépasser les limites de sa condition : ““La vie est simple quand on a perdu, pensa-t-il. Je n’aurais jamais cru qu’elle était si simple. Et qu’est-ce qui t’a fait perdre ? pensa-t-il. “Rien dit-il à haute voix. Je suis allé trop loin.”” Enfin, c’est surtout l’absurdité de la bataille sur la mer de ce vieil homme qui semble être mise en avant. Le vieux pêcheur demeure impuissant face aux requins qui dévorent son beau poisson. Cette lutte absurde et tragique peut incarner l’absurdité de la condition humaine et rejoindre ainsi une thématique largement travaillée par certains contemporains d’Hemingway, comme Albert Camus.
Enfin, la richesse de ce petit roman tient aussi à la beauté de la langue d’Hemingway. Dans un style sans grandiloquence mais qui n’en demeure pas moins noble, il transporte son lecteur sur la mer cubaine, dans le bateau de ce vieux pêcheur attachant. Le voyage de l’auteur sur les côtes cubaines est d’autant plus facile que l’écriture de l’auteur est attentive à rendre compte des mosaïques de sensations et de perceptions de chaque personnage. Je vous laisserai ainsi sur une dernière citation qui rend compte, selon moi, de la beauté de ce texte : “Les nuages s’amassaient désormais pour rencontrer l’alizé et il regarda devant lui et vit un vol de canards sauvages qui se découpait sur le ciel au-dessus de l’eau, puis s’estompa, puis se détacha à nouveau, et il sut qu’aucun homme n’est jamais seul sur la mer”.
Marie B.
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